Auditeurs et missions
Le terme « audit » provient du latin « audire » qui signifie écouter. Alors que la terminologie française a plutôt retenu des appellations telles que « révision », « contrôle », « certification », le vocabulaire actuel provient des pays anglo-saxons où il fait référence à une « inspection indépendante ».
Le rôle de l'audit consiste à s'assurer que les comptes établis par une entité l'ont été de manière régulière, qu'ils respectent un référentiel : l'auditeur exprime ainsi son opinion sur les informations qui lui sont soumises. C'est une mission particulièrement importante dans le contexte de développement du capitalisme financier où les capitaux circulent librement à l'échelle mondiale. Ainsi en France c'est la loi de 1966 modernisant le droit des sociétés qui instaure le « commissaire aux comptes » puis c'est sous l'impulsion de la construction européenne que l'audit s'est harmonisé.
Toutefois, les évolutions de la fonction audit font qu'elle dépasse bien souvent l'examen de la comptabilité, qu'elle peut être associée à une démarche de conseil et que de nombreux acteurs peuvent la mettre en œuvre.
Auditeurs
Le Commissaire aux comptes (CAC) : il s'agit du contrôleur légal, de l'auditeur légal, car sa mission est définie par la loi (le code de commerce en France). Ce sont des personnes physiques ou morales inscrites sur une liste, il s'agit d'une profession libérale réglementée. Comme le souligne la compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) :
- « C'est un spécialiste de l'audit légal fondé sur l'appréciation des risques, la qualité du contrôle interne, la validation des données comptables et des informations produites.
- Il exerce une mission d'opinion : suite à son audit, il exprime une opinion motivée en certifiant que les comptes sont « réguliers et sincères et qu'ils donnent une image fidèle », avec ou sans réserves, et en justifiant ses appréciations.
- Il peut effectuer d'autres prestations d'audit légal liées à la certification.
- Il veille au respect des réglementations et à l'évaluation des risques du secteur de l'entité concernée.
- Il dialogue avec le dirigeant, l'informe et l'alerte en cas de difficultés.
- Son statut et sa mission sont régis par les dispositions du code de commerce.
- Il veille et le cas échéant alerte le tribunal de commerce s'il apparait que la situation économique d'une entité lui semble compromise. »
Pour exercer cette fonction il faut être titulaire du diplôme d'expertise comptable (DEC) ou du certificat d'aptitude aux fonctions de commissaire aux comptes.
Le comité d'audit et les auditeurs internes : il s'agit de salariés de l'entité qui mènent diverses missions visant à assurer la qualité des informations comptables transmises ou des processus mis en œuvre en son sein. On peut regrouper dans un compté d'audit des membres d'un conseil d'administration qui n'exercent pas de fonction de direction ou des membres d'un conseil de surveillance en particulier pour l'analyse des informations comptables et financières mais plus généralement pour chaque domaine considéré comme pertinent par l'entité.
L'expert-comptable : c'est une profession libérale réglementée instaurée en France par l'ordonnance du 19 septembre 1945 qui doit être inscrite au tableau de l'Ordre des experts-comptables (OEC). L'activité peut aussi être exercée par une personne physique ou une personne morale. La loi interdit d'être à la fois le commissaire aux comptes et l'expert-comptable d'une même entité. Toutefois, la grande majorité des CAC exercent également l'activité d'expert-comptable.
La CNCC souligne ainsi que : « l'expert-comptable tient la comptabilité et présente les comptes. L'auditeur légal les contrôle et intervient sur la prévention des risques. Le premier défend les intérêts de son client et peut le conseiller. Le second intervient dans l'intérêt des parties prenantes des entités et ne peut donner de conseils stratégiques. »
Elle indique que « 92% des auditeurs légaux sont également experts-comptables, inscrits dans les deux organismes professionnels. Mais ils n'exercent jamais les deux fonctions en même temps dans la même entreprise. Comment en effet juger des comptes que l'on a contribué à élaborer ? La séparation de l'audit et du conseil garantit l'indépendance des auditeurs ».
La Loi PACTE du 22 mai 2019 a institué le statut d'expert-comptable en entreprise. Désormais, tout diplômé d'expertise comptable salarié d'une entité non inscrite à l'Ordre, qui remplit les conditions d'inscription classiques d'un expert-comptable et qui dispose d'une autorisation de son employeur pour ce faire, peut demander son inscription à l'Ordre en qualité d'expert-comptable en entreprise. L'adhésion à l'Ordre permet de porter le titre d'« expert-comptable en entreprise ».
Ils ne peuvent exercer les missions classiques d'experts-comptables (comme la tenue, la révision ou la consolidation des comptes) qu'au bénéfice de leur seul employeur, en raison du contrat de travail qui les lie. Il leur est donc interdit d'effectuer ces mêmes missions pour le compte de tiers, ainsi que de développer une clientèle propre.
Les CAC et les experts-comptables respectent des normes dans le cadre de leurs missions.
Remarque : la concentration des acteurs de l'audit. Les principaux cabinets de dimension mondiale pouvant offrir des prestations globales sur l'ensemble de la planète à toute sorte d'entité ne sont plus que quatre alors qu'ils étaient huit dans les années 1970. Les Big Four sont Deloitte, PwC (Price Waterhouse Coopers), Ernst & Young, KPMG (Klynveld Peat Marwick Goerdeler).
Des spécialistes de certains domaines peuvent être amenés à mener des missions d'audit contractuel : avocats, informaticiens, conseillers en management, ingénieurs…
Missions
Distinction audit comptable et financier / audit
opérationnel : si une entité cherche à faire certifier ses comptes annuels,
éventuellement consolidés, conformément à un référentiel (ex : PCG ou IFRS
en France), elle a recours à un audit « comptable et financier ». Ainsi,
en France, conformément à l'article L.821-53 du code de commerce : « Les
commissaires aux comptes certifient, en justifiant de leurs appréciations, que
les comptes annuels sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du
résultat des opérations de l'exercice écoulé ainsi que de la situation
financière et du patrimoine de la personne ou de l'entité à la fin de cet
exercice.
Lorsqu'une personne ou une entité établit des comptes consolidés, les commissaires
aux comptes certifient, en justifiant de leurs appréciations, que les comptes
consolidés sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du
patrimoine, de la situation financière ainsi que du résultat de l'ensemble
constitué par les personnes et entités comprises dans la consolidation. »
On parlera donc de la mission de certification des comptes pour décrire
l'opinion émise sur leur fiabilité.
Si une entité souhaite s'assurer du bon fonctionnement d'une ou plusieurs de ses activités, elle a recours à l'audit « opérationnel ». Il est généralement spécifique à une fonction (fiscalité, stratégie, informatique, gestion des stocks…) et est largement associé à une prestation de conseil pour se mettre en conformité avec les éléments qui auront été repérés par l'audit : risques, défauts, défaillances… Son but est de proposer des améliorations à une entité pour garantir sa performance.
Cette distinction repose donc en grande partie sur l'opposition entre l'audit externe et l'audit interne. Dans un audit externe (certification des comptes) la relation repose sur des documents explicites : lettre de mission, processus de facturation, rapports écrits. Dans un audit interne (opérationnel) il faut essentiellement déterminer les pouvoirs d'investigation des personnels et clarifier la confidentialité qui accompagne le processus (et qui en est le principal atout).
Distinction audit légal / audit contractuel : si l'entité est obligée de procéder à une telle vérification on parlera d'audit « légal ». Il a été introduit en droit français en 1867 pour les sociétés par actions afin de s'assurer que celles qui faisaient appel public à l'épargne offraient des garanties suffisantes. A présent, l'obligation de nommer un CAC dépend de seuils harmonisés pour les sociétés commerciales et peut s'appliquer à de nombreuses entités : les entités d'intérêt public (EIP), associations, groupements professionnels…
Remarque : les EIP sont toutes les entreprises dont les titres sont admis à la négociation sur un marché réglementé, ainsi que toutes les banques et entreprises d'assurance.
Si l'entité a choisi de faire auditer tout ou partie de son
activité, quel que soit le domaine, par un spécialiste on parlera d'audit « contractuel ». Cette
dernière forme permet un recours plus large aux différents auditeurs. L'essentiel est de différencier les missions qui s'inscrivent dans la durée (un mandat) ou qui sont ponctuelles. Ces dernières peuvent être obligatoires ou discrétionnaires.
Il faut toutefois bien souligner que l'auditeur émet une opinion, qu'elle repose sur une démarche spécifique qui ne permet pas d'apprécier l'intégralité des informations : l'auditeur donne une assurance raisonnable et est soumis à une obligation de moyens. C'est pour cela qu'il engage sa responsabilité en cas de manquement à ses obligations professionnelles mais c'est aussi pour cette raison que les missions d'audit sont parfois critiquées : les parties prenantes attendent plus qu'une « opinion sur les comptes » qui « ne comportent pas d'anomalies significatives ».
L'audit peut reposer sur des missions autres que la
certification des comptes :
- audit de la gestion : apporter la preuve d'une infraction ou d'une
fraude ;
- audits qualifiés : vérification d'un domaine spécialisé (achat, social),
d'une forme sociétaire particulière (associations touchant des subventions
publiques, collectivités territoriales), d'une méthode spécifique (cycles
d'activité, approche par les risques) ;
- audits de conformité : vérifier le respect de dispositions légales ou
contractuelles (on parle de compliance audit)
- value for money (VFM) audit : vérification de l'utilisation de financements
publics (mais peut aussi être mobilisé pour apprécier l'utilisation efficace et
efficiente de ressources en général).
Ainsi un CAC peut réaliser trois grandes missions
d'audit :
- la certification des comptes annuels et consolidés (mission légale) ;
- les services autres que la certification des comptes (SACC) : missions
spéciales sur les conventions réglementées, les rapports des mandataires
sociaux, leurs rémunérations, les opérations sur le capital, les
transformations ou les fusions ;
- les prestations de services autorisées à la demande d'une entité (ex :
conformité).
De même, un expert-comptable peut réaliser quatre grandes
missions d'audit :
- présentation des comptes : fournit une assurance modérée sur la
cohérence et la vraisemblance des comptes sociaux uniquement ;
- examen limité : fournit une assurance modérée sur la conformité des
comptes au référentiel applicable ;
- audit contractuel des états financiers : exprimer une assurance
raisonnable sur la conformité des états financiers au référentiel applicable ;
- accessoires : assistance dans des domaines spécifiques sans assurance (informations
sur la base de procédures convenues, compilation de comptes, fiscalité, tenue
de comptes…).
Enfin, les auditeurs internes peuvent réaliser des missions d'assurance ou de conformité d'une part et des missions de conseil pour leur entité. Dans certaines entreprises, l'audit interne peut être obligatoire en vertu d'un code de bonne gouvernance ou pour certaines activités (banques, assurances).
Conclusion
Connaître les caractéristiques des auditeurs ou la nature de leur mission permet d'apprécier à la fois la qualité de la gouvernance d'une entité (manière dont les dirigeants agissent et sont contrôlés), la confiance que les parties prenantes peuvent avoir envers l'entité (pour les apporteurs de ressources financières, fournisseurs, clients…) et assure une protection de l'entité elle-même (notamment avec la procédure d'alerte ou l'obligation de révélation des faits délictueux).